Hier je suis tombé sur
cette vidéo de DirtyBiology. Elle est sympa, je vous la conseille. D'ailleurs ces derniers temps tout un tas de vulgarisateurs se sont mis à sortir des vidéos plus ou moins liées au même sujet. Sans doute un effet de groupe.
Toutes ces vidéos font écho à une question que je (et probablement pas mal de monde) me suis déjà posé pas mal de fois au cours de mon existence, sous plusieurs formes : "Qu'est-ce que la vie ?", ou "Qu'est-ce que la conscience ?", voire "Est-ce que je suis la même personne qu'il y a 3 secondes ?", ou même "Existons-nous vraiment ?".
L'illustration du
bateau de Thésée me parle pas mal, et je vais m'en servir pour de développer mon point de vue. En résumé, le bateau de Thésée est une expérience de pensée, dans laquelle les pièces d'un bateau sont remplacées une à une, à l'identique, jusqu'à ce que chacune des pièces du bateau ait été remplacée. Est-ce que le bateau final est le même bateau ?
La réponse semble évidente : "oui", étant donné que nous-mêmes, êtres humains, sommes des "bateaux de Thésée", puisque l'écrasante majorité de nos cellules sont remplacées au cours de notre existence, et qu'il semble évident que je suis la même personne depuis ma naissance jusqu'à ma mort (sinon, merci de me dire à quel moment de mon existence j'ai arrêté d'être la même personne).
Sauf que l'exemple du bateau de Thésée peut être envisagé d'une autre manière : si je coupe le bateau en deux (ce qui revient à enlever chacune des pièces de la moitié arrière du bateau d'un coup), et que je reconstruis chaque moitié manquante à l'identique (ce qui revient à remplacer chaque pièce de la moitié manquante par une pièce identique), formant ainsi deux bateaux identiques, lequel est le bateau de Thésée ?
En fait, la réponse est à mon sens assez simple : le bateau de Thésée n'a jamais existé. Ce qu'on appelle "bateau" n'est qu'un modèle abstrait représentant la somme de ses constituants à un instant donné. Bien qu'on puisse, dans le cas général du bateau dont les pièces sont remplacées une par une, approximer le prolongement de son existence d'un remplacement de pièce à l'autre, le fait est que cela reste un modèle, qui s'effondre dès lors qu'on coupe le bateau en deux, simplement parce qu'il n'est pas compatible avec la discontinuité.
Là où ça devient un peu plus vertigineux, c'est qu'on peut étendre le raisonnement à tout le vivant (c'est un peu le principe du
bouturage en botanique), et en particulier à l'être humain (on peut voir la scission du zygote, qui conduit à l'existence de
jumeaux monozygotes, de la même manière). En fait, un être vivant n'a pas d'existence réelle, il ne s'agit que d'un modèle représentant, dans notre système de pensée, la somme de ses constituants tels qu'on les perçoit à un instant donné, et qu'on peut prolonger dans le temps, vers l'avant ou vers l'arrière, tant que ses constituants sont remplacés à un rythme
perçu comme continu. Un modèle bien pratique qui nous permet d'appréhender le réel de façon efficace (au sens Darwinien), mais un modèle quand-même, avec ses limites.
Voilà, maintenant vous savez que vous n'existez pas
vraiment.