Il devient difficile de se répondre! (p.84, p.86, p.89,
p.104 à laquelle je te réponds ici... heureusement ma réponse ici, p. 107, met un terme à la suite croissante du nombre de pages entre deux réponses).
Alors tout d'abord, je n'ai pas les détails de la thèse de madame Cagé, mais ses explications ne sont pas d'un niveau incompréhensible. Si elle dit que le pouvoir d'achat va reculer pour les plus modestes en France en 2019, c'est parce que:
Julia Cagé, Le 1 numéro 226, 21/11/2018 a écrit :
Ce n'est pas le ralentissement de la croissance qui explique la baisse du pouvoir d'achat des plus modestes, mais la réduction des allocations logement, la sous-revalorisation des prestations sociales, la hausse de la fiscalité sur l'énergie et le tabac, ou encore la pression fiscale accrue sur les petits retraités.
Plus tard, elle explique :
Julia Cagé, Le 1 numéro 226, 21/11/2018 a écrit :
On discute aujourd'hui de la légitimité de l'introduction d'un chèque carburant d'une valeur de 20 euros par mois, soit 240 euros par an, qui viendrait alléger le poids des dépenses incompressibles qui pèsent sur les plus modestes. Cela ne serait-il donc pas trop ? Mais c'est en moyenne chaque année 3900 euros par an que l'État verse aux 0.01% des Français aux revenus les plus élevés ayant fait un don à un parti politique. Comment ? On a mis en place un système de réduction d'impôts qui permet aux plus riches qui souhaitent s'acheter un peu d'influence politique non seulement de le faire, mais également d'être subventionnés dans leur exercice de cette liberté, qu'il faudrait pour commencer drastiquement limiter.
Je découvre avec ton message que, cela dit, en lisant cet article j'ai probablement été victime du fameux "biais de confirmation" qui a été discuté ici, puisque j'étais de base plutôt favorable à justifier le mécontentement des "gilets jaunes". Je n'ai donc pas vérifié qui était l'auteure de l'article, chose qu'il faudrait pourtant faire, je suis d'accord. Après je ne suis pas ultra surpris parce qu'effectivement, chaque semaine, en lisant Le 1, je me rends bien compte que c'est un hebdomadaire plus proche de la gauche que de la droite.
Cela dit, même en ayant appris grâce à toi que Julia Cagé est plutôt de gauche, je ne suis pas sûr qu'il faille remettre sa thèse en question pour cette raison. Autant je considère qu'il y a un vrai problème quand un.e chercheu.r.se publie des résultats sur une molécule alors que ses financements proviennent en partie d'un groupe pharmaceutique (exemple parmi d'autres de conflit d'intérêt manifeste), autant je suis moins sûr de voir un problème quand un.e chercheu.r.se publie des résultats d'économie en ayant un ancrage politique. Beaucoup de recherches sont orientées par les convictions intimes des personnes, et tant qu'il n'y a pas de financement et que la recherche est revue par les pairs, je ne vois pas de réel problème. Tu dis que précisément il y a moins de revue par les pairs, je ne comprends pas pourquoi tu dis ça, elle a l'air de publier normalement comme tout.e chercheu.r.se :
https://sites.google.com/site/juliacagehomepage/research
Après, tu as raison de dire qu'il est plus facile de faire dire ce qu'on veut à l'avenir, alors que les faits passés sont bien plus objectifs, mais néanmoins ses arguments ne sont pas idiots.
Enfin, je note un parallèle très intéressant dans le Charlie de cette semaine:
Jacques Littauer, Charlie Hebdo numéro 1382, 16/01/2019 a écrit :
Mais je vous propose une petite comparaison: pour l'instant, les mesures prises par Emmanuel Macron (non-augmentation des taxes sur le carburant, hausse plus faible que prévu de la CSG pour certains retraités, prime d'activité de 100 euros pour ceux qui vont la toucher, etc.) ont été chiffrées à hauteur de 10 milliards.
Or voilà que nos braves L'Oréal, Danone, Vinci, Saint-Gobain et consorts ont 57 milliards en trop ! N'y aurait-il pas comme un souci ? Plus fort encore : sur ces 57 milliards de cadeaux aux plus riches d'entre nous, 10 milliards concernent des rachats d'actions, c'est-à-dire des opérations dans lesquelles une entreprise donne de l'argent à ses actionnaires pour racheter ses propres actions. Dans quel but ? Les détruire, ce qui permet de faire monter le cours des actions restantes, plus valorisées car moins nombreuses ! Si, si, je vous jure que c'est ça.
Quand même, autant rémunérer les actionnaires, ça fait partie du jeu (même si je préférerais que ça soit une sorte d'emprunt où à un moment tu as fini de rembourser, qu'un pourcentage chaque année... mais bon), autant, 10 milliards passés juste à détruire des actions, alors qu'en face on a peiné à trouver 10 milliards pour les plus indigents, je ne sais pas ce que ça te fait, mais moi, ça me fait vraiment enrager. Et après on va dire que les pauvres entreprises en France payent trop d'impôts et que c'est pour ça qu'elles sont obligées d'aller les payer au Luxembourg (coucou, Amazon France) ou en Belgique (coucou, monsieur Bernard Arnault)...
Bien sûr, pas de lien direct avec le pouvoir d'achat des plus pauvres, mais quand même, voir de telles choses met légitimement en colère.