Je ne sais pas quoi penser sur les méthodes pédagogiques. Ne serait-ce que parce qu'à l'IUFM (maintenant ce sont les ESPE, bref, là où pendant 1 an maintenant 2 t'apprends à devenir prof) ils avaient à peu près autant de sens critique que certains ici, à penser que "ouaich t'as vu, l'autorité c'est naturel, y'a rien à apprendre, si tu sais pas tenir ta classe, lolzor démissionne on peut rien pour toi".
Bien sûr, certains sont d'accord avec zefreidz (les élèves il faut être ultra fdg avec eux, si tu es courtois et gentil, tu te fais défonce). Cette opinion a même été choisie pour apparaître dans un documentaire d'Arte Thema,
c'est au bout de ce lien (le documentaire dure 50 min mais l'intervention du prof en question ne dure qu'une / deux minutes).
Je dois avouer que je me souviens effectivement de mon année de stage en tant que prof, quand ma collègue de physique / chimie avait l'air d'être ultra sévère et d'entendre les mouches voler dans son cours, quand chez moi ça bavardait (oklm le cours de maths, tu t'assieds et tu parles avec ton voisin). Y'avait aussi mon collègue de sciences et vie de la terre qui me disait que cette classe était facile, comparée à ce qu'il a vu quand il était pendant 5 ans en ZEP (zone d'éducation prioritaire ; a.k.a. zone où pour les enseignants c'est pénible) en région parisienne. D'un côté il n'avait pas tort : dans son ancien bahut il devait compter les scalpels pour éviter qu'un élève n'en vole pour aller agresser son camarade à la sortie des cours... Alors bien sûr quand quelqu'un est venu me voir (quand même pas un inspecteur, ils n'ont pas que ça à faire, c'était un simple collègue) pour savoir si je faisais bien mon travail, pendant 20 min. on m'a bassiné avec le fait que les élèves discutaient. Avec un bon ZERO conseil. Et puis au fil des années, avec l'expérience, bizarrement, il y avait moins de bavardages. Est-ce que j'avais recours à la force et à l'autorité ? Bah non, j'avais recours à des petites techniques simples dégotées à gauche et à droite auprès de mes collègues pour éviter les situations problématiques... et en cours, je continuais d'être courtois et d'essayer au maximum que les élèves posent des questions.
Quel est le rapport avec le fait de poser des questions ? Quand le prof terrorise les élèves (typiquement ma prof de musique de collège qui trouvait ça marrant de rendre les copies classées ; ni par ordre croissant, ni par ordre décroissant, mais encore pire : par ordre croissant sauf la pire note, rendue à la fin), l'élève ne pose pas de question, et ne progressera pas. Quand le prof instaure un climat de confiance, alors là l'enseignement peut se passer dans de bonnes conditions. Et le respect de l'élève, tu ne l'as pas parce que tu leurs mets leur race et que t'es bon en répartie. Non, là tu as juste au mieux leur peur au pire leur mépris. Non, tu l'as parce que tu es fort dans ta matière et en pédagogie et que donc tu leur apprends des trucs - au lieu qu'ils s'emmerdent le cul sur leur chaise pendant 55 minutes pendant que tu leur parles chinois (à ce sujet j'ai assisté à un cours de 2h en Allemagne ; je ne parle pas Allemand et bien sûr c'était en Allemand ; à un moment le prof m'a posé une question, j'ai réussi à répondre en devinant de quoi il s'agissait ; personne, ni le prof ni les autres personnes du cours n'ont vu que je ne comprenais rien au cours... ça m'a fait réfléchir sur mes pratiques pédagogiques : c'est tellement facile pour un élève de ne pas montrer qu'il ne comprend rien, il suffit qu'il ne bouge jamais et qu'il se fasse oublier...)
De plus, il est ridicule de penser que cette stratégie de "je te fous la boule au ventre, c'est moi le prof, tu me dois le respect et fais gaffe parce que si je veux je te cuisse" est universelle : évidemment que de toute façon ton approche face à un groupe va dépendre dudit groupe...
Alors évidemment, ce que je dis c'est dans un monde idéal, et si on m'envoie en ZEP probablement je changerai d'avis, j'aurai envie de les passer par la fenêtre... Je suis bien conscient que devant un public vraiment difficile, mes idées de Bisounours, je peux me les carrer où je pense. Cela dit, toujours quand j'étais stagiaire, j'avais également en responsabilité un petit groupe de 6 à 8 branleurs d'une autre classe, avec des résultats catastrophiques en maths. Et bizarrement, c'était plus facile et on apprenait des trucs ! Alors c'est sûr, ça coûte cher immédiatement de réduire les effectifs quand on a des publics difficiles. Mais je suis convaincu que ça coûte beaucoup plus cher de les laisser à 30 par classe, d'avoir des tas de profs en arrêt dépression et donc besoin d'autres profs pour les remplacer, et plus tard de devoir leur payer l'assurance chômage au mieux, le RSA + d'autres allocation au pire parce qu'ils n'arriveront pas à s'insérer dans la société, puisque la France est la société par excellence où tu traînes tes diplômes toute ta vie, quelle que soit ta carrière (je me souviens du départ à la retraite d'un collègue, où le premier truc que le proviseur a dit sur la carrière dudit collègue, c'est qu'il était biadmissible à l'agrégation... mais 10^15 sabords, qu'est-ce que ça a à voir avec le boulot qu'il a fait les 40 années après, sérieusement, et est-ce vraiment pertinent d'insister sur le fait qu'il a loupé deux fois l'oral de l'agrégation, alors qu'il était un prof respecté de tous les élèves et de tous les collègues ?)... et donc qui dit pas de diplôme, dit pas de boulot (déjà que quand tu sors de thèse, le premier employeur c'est McDo, alors je te dis pas ailleurs...)
PS: les deux meilleurs profs que j'ai eus, c'étaient:
* en 2de / 1ère / Term, mon prof de grec ancien et prof de français en 1ère. Il passait son temps à nous faire des blagues (vraiment, même sur son nom, il s'appelait monsieur Santi, et ça le faisait marrer de parler de sentiments par ex., ou bien il nous parlait de l'allez Grèce...). On a appris des tas de choses sur des tas d'auteurs avec ce mec.
* en 2de année de prépa, mon prof de maths. Un autre genre, pas le temps pour les questions, il fallait se grouiller, le programme de maths était dense. Mais toujours le sourire aux lèvres et jamais cassant (surtout : jamais cassant pendant les oraux de préparation, contrairement à d'autres collègues qui prenaient un malin plaisir à essayer de nous faire chialer). C'est sûr, si tu posais une question il te disais que t'avais qu'à réfléchir et à bosser le cours, et il ne répondait pas. Mais c'est dû au système du concours, il faut voir tout le programme, pas le temps de s'attarder.
Ces deux personnes avaient le respect de l'intégralité de la classe par leur connaissance quasi infinie. Et c'est ça qu'on oublie souvent quand on dit "ouaih, y'avait untel, c'était un prof cool, ahah on lui mettait la misère". On se dit juste "il était cool". Mais j'en ai eu un prof cool moi, en terminale en histoire / géographie. Ah c'est sûr pour être cool c'était cool, tellement cool qu'on a fait deux impasses (deux pays entiers) en géographie, et qu'on n'en foutait pas une en cours. Mais ce n'est pas parce qu'elle était "cool" que je jouais au morpion et au
jeu du carré avec mon voisin (le seul autre cours de ma vie où je dessinais au lieu d'écouter, c'était un cours où le prof arrivait avec le bouquin d'un collègue qui avait édité le cours en question, et où on avait toujours l'impression que le cours était lu, parfois ânonné). Non, c'était parce que, avec le recul j'en suis quasiment certain, le prof en question manquait de connaissances.
En résumé : je pense qu'il y a des pratiques pédagogiques qui s'apprennent. Évidemment c'est plus dur quand les élèves sont durs (merci capitaine évidence), mais c'est que le système dans son ensemble ne nous donne pas les billes. Vous feriez quoi, vous, au collège, si vous ne saviez pas lire correctement ni compter convenablement ? Moi je ne sais pas, mais je comprends ceux qui ont la haine de cette école qui ne remplit pas ses obligations élémentaires, et qui déversent leur haine sur le premier venu (a.k.a. le prof). Alors d'accord, il y a un problème de respect, très bien posé par marsupial
à cet endroit. Mais le respect, si c'est dans le sens élève => prof, c'est aussi dans le sens système => élève. Qu'on boute les parents hors de l'école, qu'on les envoie se faire enculer quand ils insistent pour faire passer en CE1 leur chérubin qui ânonne, et qu'on donne des moyens aux professeurs des écoles pour que tlm sache lire écrire compter. D'un coup si tu comprends ce que tu lis en classe, ça ne peut qu'aller dans la bonne direction.