Le fabuleux destin d'un petit troll nommé Groll
Partie I
écrit par Etienne Oriez


      
1°) La bataille du marais.

Troukna, était un sorcier elfe. Enrôlé dans une guerre dont il ne connaissait même pas le but. Il avait rejoint en compagnie d’une centaine de soldats de son peuple, les troupes de Selesnya.
Lui, ne voulait pas participer à cette guerre mais l’honneur coulait dans ses veines et malgré toute l’instruction et l’éducation qu’on avait pu lui apporter, il se soumettait aux ordres de ses supérieurs. Les généraux elfes n’étaient pas stupides, mais hélas même contre leur gré, ils étaient obligés de rejoindre au combat les troupes du chef de la guilde, Tolsimir Sangdeloup, qui les avait plusieurs fois sauvés d’attaques, lorsqu’il était encore général.

Ils étaient arrivés sur le champ de bataille, près de marais puants, dans une clairière de la forêt de Golgari. Un des généraux de Tolsimir arriva avec deux bataillons.
Saprobiontes, elfes, ghildemages, loups, loxodons toutes les races se mêlaient dans cette armée.
Les elfes, impassibles, sentirent les premiers le sol trembler puis les loups se mirent à grogner férocement. Le brouillard tomba, et l’on vit sortir de la forêt des légions entières de lézards, de trolls, d’humains etc. Tous avaient le regard avide de sang et sortaient des profondeurs de marais infestés et souillés par la peste ou de caverne de Golgari. Ils étaient tous stupides, possédés ou corrompus, et ceci était une des seules choses qui pouvait profiter aux troupes de Selesnya, si l’on ne prend pas en compte l’incapacité de tous ces zombies à sentir la douleur.



VS



Mais ce que Tolsimir et ses alliés pensaient être une simple formalité, se transforma rapidement en une des plus grandes désillusions de la guilde. Tolsimir ne connaissait pas cette terre sur laquelle il avait envoyé ses soldats mais on la disait simplement maléfique. Lui, n’était pas superstitieux et voulait éclaircir rapidement et efficacement ce mystère des marais. C’est ainsi que ses quelques troupes se trouvèrent pour la première fois face à des ennemis de Golgari.
Après avoir vu les premières troupes ennemies sortir du brouillard, on en vit le double sortir de l’autre coté de la sombre clairière puis encore à droite et finalement de tous les côtés. C’est ainsi que l’armée de Selesnya, Troukna et les elfes furent quatre fois moins nombreux que l’ennemi.

Une première flèche fut décochée et c’est ainsi que la bataille commença.
De tous les côtés, on voyait sortir des centaines de créatures immondes et rugissantes.
Tous ceux dont l’âme avait un semblant de pureté étaient envahis par la peur, et la confiance en leur nouveau maître s’était évanouie d’un seul coup.
Les flèches volaient de partout, et les soldats avaient seulement le temps de se retourner avant d’être transpercés par plusieurs projectiles en même temps. On entendait des ricanements sadiques provenant des arbres de la clairière, et désormais seuls les plus courageux restaient dans le vif du combat, malgré la vue atroce de leurs coéquipiers en train de souffrir atrocement au sol, parfois même dévorés. Les loxodons tenaient du haut de leurs immenses haches et repoussaient les zombies en les faisait éclater par des coups d’une extrême violence. Les saprobiontes parvenaient à déchiqueter des corps de toutes espèces mais se faisait eux aussi déborder. La chaire giclait et on entendait des cris de partout dans ce combat bien inégal. C’est dans ces conditions que les ghildmages donnaient vies à leur créatures, protégés par les loups, mais toujours menacés par les crocs et les lances.

Mais lorsque le second assaut surgit des ténèbres, l’arrière ligne fût soufflée par une meute de zombies et d’ogres assoiffées de sang, tous les ghildmages et les archers périrent dans cet assaut sanglant. Seul les elfes, les loups et loxodons restaient debout.

Troukna était en plein milieu de la bataille, et alors qu’il concentrait corps et âme à combattre l’ennemi, il repensa au petit bataillon elfe. En tournant la tête il aperçût plusieurs de ses compatriotes morts ou gémissants, les organes à l’air. Un autre était blessé mais vivait encore, il ne pouvait bien sûr plus combattre, couché contre un arbre, à l’agonie, face à un ogre. Troukna n’eut pas le temps de réfléchir une seule seconde, et il s’empressa d’aller le sauver. Il courut au dessus des corps pour le rejoindre, et alors que le coup de l’ogre partait, notre héros le transperça d’une lance en plein cœur. Il se rendit à l’écart de la bataille en le transportant à bout de bras et utilisa ses dons de guérisseur elfe.
Alors qu’il terminait le processus, le ciel s’assombrit et comme dans un instant de curiosité général tout le monde leva la tête vers le ciel, devenu ocre. Les éclairs tombaient et foudroyaient plusieurs combattant, et soudain, tous virent une immense boule de feu sortir de l’orage. Elle se dirigeait droit sur les soldats comme si sa trajectoire était prévue au centimètre.

L’impact fut terrible, et tout le monde fut soufflé par le brasier. Tout le monde ? Non, Troukna avait observé la scène. Ce fut une tempête d’une si grande violence en un si court instant qu’il ne savait pas d’où cela pouvait provenir. La crainte s’empara de son coeur. Puis, après, il repensa à son ami, qui était mort dans ses bras. Le procédé de guérison ayant été stoppé par la déconcentration qu’avait causée le cataclysme. Il traversa la zone dévastée. Les corps gisaient les uns sur les autres, encore fumants, et l’odeur dégagée par tant de cadavres était insoutenable. Les traces de brûlures qui étaient sur l’herbe, s’arrêtaient nettes derrière les victimes, la terre passait de brûlée et stérile, à verdoyante. Pour lui, aucun doute n’était plus possible, l’attaque venait d’une puissance surnaturelle, qui avait déterminée au centimètre près, le point de chute de la boule. Ainsi son ami l’avait sauvé sans le vouloir et c’est à cet instant qu’il pensa qu’une nouvelle guilde encore plus cruelle et terrifiante était née.




2°) La découverte du véritable héros.

Après tant de découvertes et d’émotions fortes, Troukna retrouva tous ses esprits mais n’eut pas le temps de respirer. Une nouvelle troupe provenant des marais de Golgari avait sentit la terre tremblée et l’odeur de la chair encore fumante. Seul, l’elfe ne pouvait rien faire, mais son ouïe bien plus perfectionnée que celui de n’importe quelle créature lui laissa quinze secondes pour fuir, et il ne s’en priva pas. Il se retourna, et courut en direction de la forêt. Juste avant de pénétrer l’épaisse muraille créée par les arbres, il aperçut un linge noir et troué. Il vit un nouveau né à l’intérieur, et pris, sans même réfléchir, la décision de l’emmener avec lui.

Une fois arrivée au cœur de l’endroit préféré de n’importe quel elfe, il s’arrêta. Il avait eu un peu de chance - si on peu considérer cela ainsi après cette bataille gravée à jamais dans son esprit - car il n’était plus suivi, et hors du territoire des Golgari, donc dans une forêt beaucoup plus hospitalière.

En deux temps trois mouvements, il prit la précaution de se percher en haut d’un arbre, pour être plus en sécurité, et enfin pouvoir observé ce morceau de tissu. A sa grande surprise, ce linge noir, troué et puant, ne contenait non pas un homme, mais un troll…

Il avait de gros yeux globuleux d’un marron très clair mais le fond de son regard était sombre. Son nez était long et couvert de petites verrues mais elles accentuaient son air de pauvreté, et ses oreilles pointues étaient à peine recouvertes par quelques cheveux très fins et clairs, qui étaient parfaitement mis en valeur par sa peau vert kaki. Il avait l’odeur d’un mélange de terre, de boue et de vase et personne ne semblait s’être déjà occupé de lui, tellement il paraissait sale et avait le regard vide.

Troukna n’était ni son père, ni de sa famille, mais il savait que les êtres qui sortaient de ces marais étaient tous maléfiques. Or, ce bébé avait sûrement du être oublié par un habitant d’une ferme à putréfaction, où il aurait été dévoré au moindre manque de nourriture. Il prit donc la décision d’apporter la lumière dans au moins une vie durant cette sombre journée.
Il allait l’élever et l’éduquer comme un fils, malgré le physique peu ressemblant. Et avant de songer au reste, il lui donna un nom, et ce petit troll devint Groll.


3°) L’apprivoisement de Groll.

Les premiers mois furent les plus difficiles. Groll était agressif par moment, car l’odeur et l’habitat dans lequel il vivait lui semblaient étrangers. Alors, comme il était encore jeune et perturbé aux premiers contacts avec Troukna, il se défendait, mordant avec ses petites dents déjà bien pointues.

L’elfe prit rapidement conscience que son fils adoptif devait dès à présent s’habituer à sa présence, son contact, et son lieu de vie. Sinon, avec toutes ces morsures, qui allaient devenir de plus en plus grosses avec l’âge, il ne finirait pas entier. Il décida donc, chose incroyable pour un troll, de lui donner son premier bain, afin qu’il oublie toute odeur de son marais natal.
Au contact de l’eau, le petit monstre parut dégoûté, mais il fallait s’y faire. C’est ainsi que toutes les traces d’agressivité disparurent en une seule semaine, suite à des séances de lavage intensives. Le problème d’odeur était réglé, maintenant il fallait passer à l’habitat.

Pour cela, il appliqua la même méthode que celle des elfes ; apprendre à connaître les arbres avant de maîtriser la marche au sol. Troukna remédia d’abord au vertige, présent chez chaque troll dès la naissance, en l’emmenant en haut des plus grands arbres de la forêt. Il promena ainsi le pauvre Groll, qui s’accrochait à son dos, durant quelques heures chaque jour, passant d’arbre en arbre rapidement ou s’arrêtant pour observer le sommet de la forêt. Le vertige avait quitté sa petite créature, le jour où il commença à essayer de marcher, sur les branches.
Alors, une nouvelle étape était franchit, et désormais c’était la dernière épreuve pour devenir digne de la forêt : savoir se déplacer, comme son père, comme un elfe, à travers les arbres.

Encore une fois, Troukna, notre cher sorcier avait la solution. Chaque jour, il montait au dessus du plus grand arbre de la forêt, et une fois Groll en équilibre sur une branche, il le lâchait. Et à chaque fois, on assistait à la même scène. Le troll tenait debout sur quelques mètres, puis tombait. Mais l’elfe savait que son cher petit chuterait ainsi durant plusieurs jours, et c’était là le but de l’exercice. Il devait tomber et se rattraper par lui-même, il y avait d’autres méthodes mais, pour Troukna, l’instinct de survie était le meilleur maître. Et c’est ainsi, que pour la première dans sa vie, Troukna vit un troll se déplacer dans les arbres, et s’attacher à lui, avec de l’affection. Désormais cette petite créature était son fils.

L’elfe resta 5 ans dans la forêt avec sa progéniture à perfectionner ses réflexes et même à lui apprendre à maîtriser des tours de magies encore inoffensifs. Durant cette période, son attention s’était complètement canalisée sur Groll et il avait oublié la vie civilisée. Il décida donc de revenir en ville, discrètement, laissant le troll à la frontière de la forêt. Il voulait avoir des nouvelles des autres bois, l’issue de la guerre, et bien sur être au courant de tout ce qu’il avait pu rater lors de son exil en forêt.


4°) Causes et conséquences.

Troukna eut des remords alors qu’il apercevait le Conclave. L’elfe se sentait dans la peau d’un lâche en se remémorant tous les événements qui avaient suivi le massacre de ses compagnons. Il devait accomplir son devoir, en l’honneur de tout son bataillon perdu, pour leur mémoire, pour le reste de dignité qui brûlait encore en lui. Il allait raconter ce qui s’était passé pour repartir avec Groll la conscience soulagée et ensuite oubliée cette vie, cette guilde et ces guerres qui corrompaient les âmes de ce monde.

Il s’approcha des portes. Soudain, il aperçut sur le mur des recherchés, son nom et tout ce qui pouvait le décrire. Troukna comprit rapidement ce que tout cela signifiait. Il avait abandonné le champ bataille selon les dirigeants de Selesnya et c’était donc un traître voire même peut-être un espion qui devait être puni. Sur ce point, la guilde était formelle, tous ceux qui ne croyaient plus au culte de la lumière et de la paix devaient être exécutés sans pitié, dans ce monde seuls les justes et les plus valeureux devraient survivre. Bien qu’il concevait cette punition et l’acte de lâcheté qu’il aurait pu commettre aux yeux de certains sous l’emprise de la peur, il savait que Selenya ne pouvait pas compter ses pertes, et savoir qui il manquait sur le champ bataille, surtout quand tous les soldats avaient été broyés et carbonisés dans un tourbillon de flammes mystérieux…

L’elfe réfléchit, se reconstitua la scène, et trouva qui aurait pu dénoncer sa fuite. Il fallait que ce soit un être en parfaite santé, un être qui n’ait peut-être même pas combattu, et lui seul savait qui était capable de ressentir ce mépris vis-à-vis de ses troupes.
C’était un des officiers de cavalerie qui aurait sans doute pris la fuite à cheval en voyant la boule de feu à l’écart du combat.

Même s'il se posait encore des questions sur cet avis de recherche relativement mystérieux, sa réflexion s’arrêta quand il vit quelqu’un qui s’approchait.

C’était un mage couvert par une capuche, entièrement vêtu de blanc. Il était bien évidemment au service du Conclave et s’approchait de plus en plus. Troukna prit peur, il se retira dans un coin plus sombre, à l’abri, et garda soigneusement le troll contre lui.
L’homme décrocha un des avis de recherches, qui n’étaient hélas pas le sien. Au même moment il entendit des cris sur la place du marché, une exécution venait d’avoir lieu. Ses talents d’elfe lui permirent de distinguer le visage du mort, qui lui dit quelque chose.

Troukna eut un choc terrible en s’apercevant que c’était effectivement un des supérieurs qui avait assisté à la bataille. Il fut complètement pris de panique, ainsi ses hypothèses, qu’il pensait improbables, s’étaient réalisées. L’officier l’avait vendu et s’était condamné, le jour même où Troukna revenait en ville après son long exil dans la forêt.

Tout cela faisait beaucoup trop de coïncidences pour une même journée, qui plus est, précisément celle de son retour en ville. Le sorcier elfe eut un pressentiment, c’était l’aventure de sa vie et elle allait connaître un tournant, c’était une certitude.

Il sortit de l’impasse, paniqué, et dans un élan de précipitation, il n’eut pas le temps d’apercevoir le loxodon qui gardait la porte. L’éléphant qui grâce à sa mémoire hors du commun - qui caractérisait si bien cette race - réussit à l’identifier en se souvenant de l’avis de recherche accroché au mur. Le gardien se saisit de sa lance et sonna l’alerte. Tous les gardes disponibles sortaient des immenses grilles de la cour intérieure et tous se lancèrent à la poursuite de l’elfe, qui ne pouvait que fuir.





Plein d’agilité, il sut échapper à plusieurs projectiles qui fusaient et ainsi ils déboulèrent dans la place du marché de Ravnica. Troukna sautait au dessus des échoppes comme dans une forêt, et les soldats bousculaient les passants pour se frayer un chemin dans la foule, renversant toutes les marchandises sur leur passage.

Notre héros était désormais aux abords de la forêt, la liberté était si proche. Troukna était essoufflé. En pleine course il se retourna, et un instant plus tard, une lance lui transperça la jambe.



Neutralisé et voyant les soldats arrivés, il pensa à Groll, et son avenir, sa dernière pensée avant son arrestation fut pour lui et une larme traversa son visage. Il fut immédiatement jeté en prison.
C’était irréel, il avait passé tant de temps dans la forêt, avec Groll, et le jour où son destin le rappelait pour qu’il se souvienne de ses frères morts à ses côtés, son bourreau se faisait exécuter pour la même sentence que lui et tout son passé le rattrapait.

Les guildes n’oubliaient-elles donc jamais ?


5°) Sanctions et cruauté.

Le procès de Troukna fut rapidement expédié, il savait ce qui l’attendait et c’est sans surprise qu’on le conduisit jusqu’au lieu d’exécution sur la place du marché. Qu’est-ce qui pouvait encore le sauver, Groll ? Des elfes ? Ou la morale de cette histoire ? Rien, hélas. La hache du bourreau s’approcha, et les marchands n’y prêtaient même plus d’attention, c’était une routine dans laquelle il était tombé, une cruauté banale dans Ravnica.

Le sorcier elfe ne pensait plus à sa vie désormais, les regrets étaient inutiles, mais celle de Groll le préoccupait, il était devenu sa chaire, son sang, sa raison de vivre, et au moment où il fut transpercé en pleine gorge, l’idée de ne plus voir son troll lui fendit le cœur.

Même si Troukna ne s’en doutait pas avant de mourir, Groll était là aux abords même de la forêt où son père fut capturé. Il assista à la scène du haut d’une branche, et vit Selesnya tuer celui qui l’avait élevé pendant toutes ces années. Il vit les marchands indifférents et les serviteurs du Conclave qui étaient divertis par cette scène. Et l’amour qu’il éprouvait pour cet elfe mêlé à la haine qu’il ressentait pour cette guilde qui avait tuée une partie de son cœur, le mis dans une rage qu’il ne pouvait plus contrôler. Il se prit la tête à deux mains et l’obscurité qui baignait au fond de ses yeux s’empara de lui, il poussa un cri de colère et deux boules d’énergies sortirent de ses mains, il ne voulait plus qu’une seule chose, se venger.

Groll déchaîna cette puissance encore inconnue pour être si jeune sur la place du marché et plusieurs échoppes s’embrasèrent dans l’explosion qu’il avait causée. Le troll prit peur, il ne se connaissait plus, et désormais il n’y avait plus personne pour l’aider. Il prit la fuite au fond de la forêt.

Le troll allait devoir prendre sa magie en main, et décida d’apprendre à la maîtriser pour une seule chose : assouvir une puissance qu’il sentait infinie et se venger auprès des guildes qui avaient détruit sa vie, Selesnya et Golgari.

Ainsi il passa dans une folie obscure et décida de bientôt revenir dans les quartiers sombres de la cité, là-bas son destin l’attendait...



NDLA : Je n'ai pas trouvé assez d'images pour repésenter les soldats, j'espère que votre imagination a fait le reste.