Légendes de Selesnya
Tome 1 : L’épée des Paruns


      Voici le prologue et le premier chapitre du tome 1 des :



Tome 1 : L'épée des Paruns


Prologue :


-Il est temps, maître.
-Je sais !

La froideur de la réponse de Téfeiri avait étonné son serviteur. S’il connaissait seulement les ennuis qui troublaient le maître d’Azorius, alors il comprendrait... En effet, le souverain savait... il savait qu’il était temps... il savait qu’il était temps de commencer le festival du dix millième anniversaire du pacte des dix guildes. Mais il sentait qu’un vent de discorde gagnait la grande cité des dix guildes... il sentait qu’une coalition tenterait de briser la paix qui régnait... mais il ne se passera peut-être rien de tout cela... pourtant Téfeiri, ancien seigneur de Zhalfir, désormais maître de la guilde d’Azorius et extrêmement influent à Ravnica, sentait son heure approcher.
Le serviteur répéta :
-Il est temps, maître.
-Je viens.


Téfeiri était, comme depuis trente ans, le président du festival. Ce dernier commence comme chaque année par un long défilé, de Pravh, la capitale d’Azorius, aux plus hauts jardins de Vitu-Ghazi, capitale de Selesnya. C’est à ce dernier endroit qu’a été signé le pacte des guildes, c’est en ce lieu qu’une immense fête rassemblant tout le peuple de Ravnica a ensuite lieu chaque année.
A la sortie du souverain, le peuple l’acclama. Mais les Rakdos et les Gruul restèrent de marbre, remarqua Téfeiri. A sa grande joie, ce dernier aperçut également les Wojek, puissante division de la guilde de Boros, chargés de faire régner l’ordre pendant le festival. Le défilé commença dans la joie et la gaîté. Pourtant, il demeurait une atmosphère étrange, comme si tout cela n’était qu’un rêve, un rêve qui risque à tout moment de se transformer en cauchemar.
Le défilé commença. Dans la joie et la bonne humeur, me direz-vous ? Mais ce n’était que de faux sourires qui se dessinaient sur la foule. N’importe qui l’aurait compris s’il avait été à la place de Téfeiri. On sortit de Pravh, le peuple acclamait toujours. Peut-être que le vent de discorde n’était qu’un fruit de l’imagination du maître d’Azorius ! Et pourtant... Cela ne rassura pas pour autant Téfeiri.
Toutes les capitales des guildes défilèrent. Le président se calma. Sa fausse joie devint presque vraie. Ses craintes se dissipèrent. Pas de mouvement d’agitation hostile parmi la foule. Ce défilé s’était donc bien déroulé. On arrivait aux jardins de Vitu-Ghazi.

Mais lorsque Téfeiri fut au comble du radoucissement, ce qu’il redoutait arriva malheureusement. Sur un signal de Circu, seigneur des Dimir, une coalition se forma autour de Téfeiri et ses alliés. Une coalition de cinq guildes, Rakdos, Gruul, Dimir, Orzhov et Golgari contre une alliance de cinq autres guildes, Simic, Izzet, Boros, Azorius et Selesnya. Il y eut un peu de tumulte parmi le peuple mais chacun y était finalement préparé. Tout le monde craignait que cela arrive. Chacun savait que cela devait se produire. Téfeiri, lui, en tant qu’homme le plus redouté par la coalition, commença à préparer le lancement de puissants sorts. Mais un homme lui bloqua le chemin. Il se dressa de son imposante taille devant le mage le plus puissant de Ravnica. Cet homme était Circu. On lisait sur son visage toute la haine, la vengeance, tous les défauts que l’on pouvait accumuler à Ravnica. Téfeiri ne frémit pas, quoique son adversaire fût son ennemi le plus redoutable. Alors, une bataille acharnée commença entre les deux puissants mages.
-Je vois que tu te bats toujours aussi bien depuis notre dernière rencontre Circu !
-En effet, mais cette fois, je compte bien obtenir ta mort !
-Compte là-dessus !

La coalition avait cessé pour laisser place à un public ébahi par le combat. Les sorts fusaient entre les deux hommes. Je ne pourrais tous les inscrire ici, la place manquerait.

Tout à coup, Circu se concentra fortement. Qu’allait-il lancer comme sort ? Téfeiri en profita et se jeta sur lui. Mais son adversaire avait prévu la parade : une « emprise de la Citeraine » l’avait remis à sa place. Et là, Circu lança l’ultime sort que peut connaître un Dimir : « l’aperçu de l’inimaginable ». Ce sort brouille complètement les facultés du cerveau adverse, dont le possesseur devient extrêmement vulnérable. On crut que c’était la fin de Téfeiri. Mais ce dernier, ralentit le sort avec une « déférence », suivi d’une « circonvolution » pour le contrecarrer. Puis il cria :
-Essaye de survivre à ceci !
Circu savait par ces mots que Téfeiri allait lui imposer son « rapide silence », sort surpuissant, connu par une seule personne : l’adversaire de Circu. La dernière fois que les deux s’étaient affrontés, Téfeiri avait daigné épargner Circu. Mais cette fois, le chef de la rébellion s’y était préparé. Et pourtant ! Malgré sa rapidité à se défendre, il ne fut pas épargné par la première salve qui le blessa cruellement. La deuxième ne se fit pas attendre, l’achevant net.

Le maître des Dimir tomba de tout son long au sol, et le moral des rebelles fut lourdement abaissé. La victoire semblait gagnée pour les protecteurs du pacte des guildes. Néanmoins, le président du défilé restait sceptique. Savait-il vraiment si son heure était venue ? Toutefois, en tant qu’homme le plus redouté par la coalition, il commença à préparer le lancement de puissants sorts. Mais un homme lui bloqua le chemin. Non, cet homme ne pouvait pas être Circu, c’est impossible ! Mais la ressemblance était tellement frappante que Téfeiri demanda :
-Qui es-tu, toi qui as assez de cran pour m’affronter ?
-Mon nom est Szadeck, disciple de Circu, seigneur des Dimir. Tu as tué ce dernier et je suis venu venger son honneur.
-Serais-tu plus fort que ton maître ?
-Tu le sauras bientôt.

Tout espoir n’était pas perdu dans les rangs de Circu. Mais on se disait qu’il en faudrait beaucoup pour qu’un simple élève soit victorieux d’un mage expérimenté. La jeunesse de son adversaire gêna Téfeiri.
-Je ne veux pas te tuer, dit-il. Tu es trop jeune pour mourir.
-Sans mon maître, je ne suis plus rien. Je préfère mourir plutôt que de ne pas le venger.
-Soit
, répondit sèchement Téfeiri.
Le maître d’Azorius commença à préparer son « rapide silence ». Mais Szadeck ne bougea pas. Ne l’avait-il pas remarqué ? Ou voulait-il vraiment mourir ? A moins qu’il soit vraiment trop inexpérimenté pour affronter Téfeiri.
Mais au moment où Téfeiri lança le sort ultime, Szadeck lança un sort appelé plus tard « invitation à la paranoïa ». Téfeiri n’arrivait alors plus à se contrôler et son sort se retourna contre lui, le paralysant fortement, mais ne le tuant pas pour autant.
Dans la foule, de nombreuses réactions ne se firent pas attendre. Non, c’est impossible ! Comment Téfeiri avait-il pu être vaincu par un aussi jeune mage ? Dans la partie adverse, ce n’était que des rires et moqueries envers le maître d’Azorius, qui devait endurer cela jusqu’à sa mort.
-Alors, tu es vaincu, Téfeiri ! Le grand maître d’Azorius, et de Ravnica, le tout-puissant, même ! cria le nouveau maître de Dimir.
Personne n’entendit ce que l’autre lui répondit. Mais tout le monde remarqua que l’attitude de Szadeck s’était grandement radoucie. Il semblait très interpellé par les paroles qu’il venait d’entendre.
Puis, un cri déchirant se fit entendre. Tout le peuple de Ravnica se tut aussitôt. Téfeiri venait de rendre l’âme.



Chapitre 1 :


300 ans ont passé. Nous retrouvons un jeune elfe, sans foi ni guilde. Son village ayant jadis été ravagé par la guerre des guildes, ses parents crurent bon de l’abandonner dans la forêt au milieu des loups. (Si cela peut vous sembler étrange, n’oubliez pas que c’est seulement dans Ravnica que les loups gardent la bergerie). C’est pour cela qu’il répond au nom de Tolsimir Sangdeloup. Aujourd’hui, un loup de la famille qui l’a élevé, l’accompagne encore sur les routes de Ravnica. Lui, s’appelle Voja. En fait, ils sont comme deux frères, car ils ont été élevés dans un milieu commun et en même temps, il n’y a que l’espèce qui change. Mais cela n’a pas d’importance pour les deux amis.
-Tu lis encore ce livre ? demanda Voja.
-C’est le seul livre qui parle de paix et d’espoir à Ravnica, répondit Tolsimir. Et cela me rappelle le vieil homme qui me l’a donné. Il était tellement hospitalier ! Et toi, ne veux-tu pas lire ce recueil ?
-Très peu pour moi
, rétorqua Voja. Comment s’appelle-t-il, déjà ?
-« Les légendes de Selesnya », un nom attirant, non ?
-Pfff... Encore un attrape-touriste de ces guildes à la noix. Je suis sûr que ton vieil homme venait de Selesnya, pour nous inviter à y venir.
-Pas bête comme idée ! Nous n’avons pas encore visité cette guilde !
-Attends, je sors mon guide touristique, pour voir ce qu’ils disent sur toutes les guildes.
-Tu as acheté un guide touristique ??? Et après, tu m’accuses de me faire avoir en achetant plein de bouquins...
-Oui... hum... bon, tais-toi et écoute :


« Il existe depuis la nuit des temps exactement dix guildes à Ravnica. Un pacte fut jadis signé entre ces guildes pour faire régner l’ordre. Mais 5 guildes ont abusé de ce pacte. C’est pourquoi, les guildes suivantes ont créé une rébellion :
La guilde des Gruul. Les Gruul, dirigés par Borborygmos, maîtrisent les éléments des forêts et des montagnes. Ils vivent à Skarrg, non loin de leur magnifique terrain de prédilection. Leur armée est innombrable, constituée d’elfes, de sangpyres, de guivres, d’élémentals et de géants, privilégiant la force à toute autre technique de combat.
La guilde d’Orzhov. Les Orzhov, dirigés par Teysa, vivent de l’absorption du mana adverse pour produire de l’énergie. Ils habitent à Orzhova, où se trouve la fameuse reliquaire des Orzhov. Elle réunit donc des ogres, des vampires, des zombies, des rats, des rapaces et même des anges.
La guilde des Golgari. Les Golgari, dirigés par Savra, connaissent le secret de l’immortalité en réanimant les troupes mortes au combat, troupes constituées de zombies, d’elfes, d’ombres, de guivres et d’élémentals. Ils vivent à Svogthos, où l’on peut admirer le magnifique tombeau luxuriant du dragon créateur de la guilde, dit-on, mais ce n’est qu’une légende.
La guilde de Rakdos. Les Rakdos, commandés par Rakdos (très original), possèdent une colossale armée de rats, sangpyres, et de mages de batailles lançant des boules de feu dévastatrices. Ils vivent à Rix Maadi, le palais donjon, où l’on peut visiter une merveilleuse crypte. Toute la guilde est d’une beauté suprême et est vraiment magnifique.
La guilde des Dimir. Les Dimir, sous le règne de Szadeck, sont les mages les plus puissants de tout Ravnica. Ils connaissent de nombreux sorts tels que l’ « invitation à la paranoïa » ou encore l’ « emprise de la Citerraine ». Ils vivent à Manteaubrune, où se tient la tombe aquatique de Circu, ancien maître de cette guilde.

Il est vrai qu’à première vue, on pourrait penser que ces guildes ne sont pas du côté du bien et de la paix à Ravnica, mais si elles ont déclenché une rébellion, c’est parce que ces 5 guildes ont abusé du pacte des guildes :
La guilde des Simic. Les Simic, eux, se partagent le mana, pour se le greffer en tant que force supplémentaire. Ils effectuent de nombreuses recherches stupides et insignifiantes sur les algues et sur un nouveau métal. Dirigé par Momir Vig, visionnaire Simic, ils vivent à Novijen où se trouve un horrible bassin d’élevage d’algues hideuses en tout genre.
La guilde des Izzet. Les Izzet possèdent de nombreuses balistes incendiaires à répétition, mécanisme que leurs ingénieurs ont inventé qui leur permet de lancer plusieurs salves en 1 coup. Mais en fait, ce principe ne fonctionne strictement pas et est complètement mauvais. Leur armée est essentiellement constituée de mages, secondés par des petits dragons et des créatures étranges, anomalies de recherche qui ne vivent qu’un jour. Ils vivent à Nivix, sous le commandement de Niv-Mizzet, où se trouvent une grande université et de nombreuses cheminées à vapeur qui polluent l’atmosphère. Mais c’est ce qui leur permet de produire de l’énergie pour la cité.
La guilde des Boros. Les Boros, commandés par Razia, veulent depuis toujours faire régner l’ordre et la discipline avec leur division Wojek d’élite de soldats, chevaliers, anges, sangpyres et géants. Il est intéressant de noter qu’il utilise pour cela le chaos. Ils vivent à Solcastel où une fonderie leur fabrique des armes assez fragiles. Leur faible légion est secondée par des mages de bataille qui lancent des boules de feu, mais qui n’arrivent pas à la cheville de ceux des Rakdos.
La guilde d’Azorius. Les Azorius, dirigés par Augustin IV, forment une armée de chevaliers, d’oiseaux et de mages. Ces mages savent contrecarrer les sorts et affaiblir les créatures adverses. Seulement, quelque chose qui s’est déroulé durant le passé les a fortement affaibli moralement. Seuls les Azorius savent quelle est cette chose. Il paraît qu’auparavant Augustin était extrêmement redoutable : Téfeiri lui avait, dit-on, enseigné de nombreux sorts. Mais aujourd’hui, ce n’est qu’un mollusque, bien trop prudent. Les Azorius vivent à Pravh, anciennement point de départ du festival du pacte des guildes, où l’on trouve la plus laide des fontaines de Ravnica.
La guilde de Selesnya. Les Selesnya vivent grâce à l’entraide et l’égalité entre eux. Leurs bataillons d’elfes et d’éléphants peuvent invoquer grâce à de nombreux chants des guivres ou des élémentals. Certains disent même qu’un vieil elfe saurait invoquer un gigantesque scion qui vit dans la forêt. Certains elfes, eux, créent des saprobiontes, créatures moussus, ne vivant qu’un jour et qui polluent Ravnica. Car il faut bien l’admettre, malgré ses principes enchanteurs, les Selesnya, sous le règne de Loxodon, font partie de la guilde la plus minable. En fait, leur guilde n’est qu’un attrape-nigaud à ceux qui liront leurs stupides « légendes de Selesnya » pour immigrer à Vitu-Ghazi, leur capitale. Cette cité contient d’ailleurs les jardins délabrés et plutôt affreux, lesquels étaient le point d’arrivée du festival. »

-Hé bien, il en tient une couche, ton guide ! s’exclama Tolsimir.
-Maintenant, tu vois que j’avais raison ! Selesnya est une guilde-bidon. Alors que Rakdos est tellement attirante ! Tiens, d’ailleurs, si on y allait ? Juste pour visiter, bien sûr...
-Oui, et après, on s’installe, on fonde un foyer, on fait des bébés, et...
-...bon, ça va
, l’interrompit Voja. Admets quand même que tu t’es gouré.
-D’accord, je me suis trompé. Allons explorer cette guilde puisque tu y tiens autant !


Et c’est ainsi que les deux compagnons se mirent en route vers Rakdos qui semblait si attrayante. Ils se situaient alors à 30 km de la guilde. Etant de bons marcheurs, ils devraient y arriver une douzaine d’heure après, vers le coucher du soleil.
Douze heures ! C’était sans compter les embûches que leur réservait leur chemin. Des brigands à chaque kilomètre ! Mais les deux amis avaient l’habitude de ces mauvaises rencontres et se débrouillaient extrêmement bien au combat. Tolsimir avait d’ailleurs une magnifique épée, seul objet qui le rattachait à sa vraie famille, pour se défendre. Ils étaient poussés par une sorte d’unité et de solidarité, comme vous pouvez le constater...
-Vas-y, criait Voja, carapaté derrière un arbre. Tu vas y arriver, tu peux tous les tuer ! Euh, c’est pas que je suis nul au combat, mais là je suis attaqué par un géant. A l’aide !
Tolsimir se retourna et ne vit personne. Il baissa alors les yeux et vit un nain d’à peine 1.30m les bras levés.
-Hahaha, riait-il. C’est de ça que tu as peur ?
-Ah oui mais attends
, rétorqua l’autre. Je lui ai asséné des bons coups de griffes, si bien qu’il a rétréci d’au moins deux mètres !
Voja avait toujours le chic pour se trouver des excuses bidons, ce qui ne manquait pas d’amuser Tolsimir. Oui, les deux amis étaient vraiment faits pour s’entendre pour toujours.

Et ils continuaient leur chemin, infatigables. Ils avaient l’habitude de ces grandes randonnées à travers les forêts de Ravnica. Et ils ne se lassaient d’admirer la beauté de la nature. Tantôt sauvages, tantôt accueillants, les sentiers qu’ils empruntaient n’étaient pas les grands axes pavés et rectilignes. Ils préféraient utiliser les sentiers rocailleux, sinueux, et souvent difficiles. De plus, les axes étaient souvent traversés par de nombreuses armées, qu’ils ne voulaient pas rencontrer. Le soleil resplendissait dans l’azur du ciel bleu. La journée était magnifique. Et combien marcher dans la merveilleuse forêt devait être agréable ! Des petits cours d’eau croisait par moment la route de Tolsimir et de Voja. Ces derniers pouvaient alors s’abreuver à une source intarissable d’eau, limpide et claire. Ils pouvaient également s’y laver (en évitant de se désaltérer ensuite, de préférence…).

Enfin, le soir, il arrivèrent au sommet d’une grande montagne, qui dominaient tout le paysage aux alentours. Ils aperçurent en face, perché sur un haut rocher, Rix Maadi, capitale de Rakdos. La ville était resplendissante de toutes ses lumières. Elle semblait imposante, puissante. Elle donnait une impression de sûreté, qu’aucun ennemi ne pourrait jamais y pénétrer. Elle était en effet magnifique, semblant vouloir rivaliser avec la beauté de la lune, qui l’éclairait. Tolsimir et Voja la contemplèrent quelques minutes, peut-être même des heures. Pour eux, le temps semblait s’arrêter. Ils savaient en ce moment même que c’était là qu’ils allaient habiter. Oui, Rakdos deviendrait leur guilde. Et peu à peu, les lumières lointaines s’éteignirent. Il était temps de dormir. Les deux amis s’endormirent aussitôt dans un paisible sommeil, épuisés par cette longue marche.

Ce fut Tolsimir qui s’éveilla le premier. A côté de lui, le jeune loup ronflait à s’étouffer. Mais L’elfe ne le remarqua pas. Une autre chose l’interpellait. Il lui semblait que la matinée était déjà bien avancée. Pourtant, c’était encore la nuit. Mais pas une belle nuit comme avant qu’ils s’endorment. Une nuit de cauchemar, où la lune, rougeâtre, une lune de sang, semblait être une grave blessure du ciel sombre. Que s’était-il donc passé ? Où était passé cette si belle lune, ce si beau ciel ? A moins que ce ne soit qu’un stupide cauchemar. Tolsimir ferma donc ses yeux, puis les rouvrit, quelques instants après. Le même spectacle s’offrait alors à ses yeux. Il se sentait perdu dans cette immensité qu’était le ciel. La solitude lui… Voja ronfla de plus belle, ce qui atténua toute idée de solitude. Tolsimir se dit alors que c’était encore la nuit, qu’il fallait dormir, et que le lendemain, ils se rendraient à Rix Maadi. Il essaya de se rendormir.

Quand soudain, un bruit parvint à ses oreilles. Tout le monde sait que l’ouïe d’un elfe est très fine (si vous en doutez, regardez leurs oreilles). Pourtant, Tolsimir doutait que ce bruit fût réel. Peut-être n’était-ce que le fruit de son imagination. Mais le bruit recommença. Cette fois, le jeune elfe eut la certitude qu’il était réel. Il paraissait provenir du pied de la montagne. Oui, il venait de la forêt qu’ils avaient franchie. Le bruit se rapprochait légèrement. Tolsimir se leva, regarda de l’autre côté de la montagne. Et il vit, presque au pied de celle-ci, une horde de gobelins assoiffés de sang, qui gravissait la montagne. Aucun doute qu’ils ne feraient qu’une bouchée de l’elfe et du ronfleur. C’est pourquoi Tolsimir éveilla Voja. Enfin, « éveilla » est un bien grand mot. Son compagnon était plongé dans profond sommeil. Apparemment, il n’avait aucune envie de se réveiller. L’armée se rapprochait. Peut-être était-elle au fond extrêmement sympathique et qu’ils épargneraient les deux amis. Peut-être… Mais le doute était bien trop grand pour que Tolsimir restât là les bras croisés. Alors que les gobelins arrivaient au sommet de la montagne, l’elfe attrapa le loup, le porta sur ses épaules (aussi lourd qu’il fut) et courut en direction de Rakdos. Il espérait bien trouver là-bas asile et refuge.

Une course effrénée commença. Tolsimir, portant toujours Voja, dévalait l’autre versant de la montagne. Il se demandait si les gobelins l’avaient vu. Voulaient-ils s’en prendre à lui et à son ami ? L’elfe n’avait pas la moindre envie d’aller leur demander. Il continuait à courir, à courir… Enfin, il arriva au pied de la montagne sur laquelle ils avaient dormi. Quelques kilomètres les séparaient du rocher de Rix Maadi. Comment Tolsimir trouva-t-il la force de les franchir ? Portant une charge aussi pesante (car il fallait bien le dire, Voja était relativement lourd), il ne fatiguait pas, ne s’arrêtait pas, il continuait encore, et encore… Au pied de la montagne de Rakdos, Voja se réveilla, à la grande joie de son porteur. Ce dernier lui exposa la situation tellement rapidement que le loup n’y comprit goutte. Alors Tolsimir pointa du doigt la horde de gobelins qui se rapprochait d’eux. Aussitôt, Voja fut pris d’une soudaine envie d’escalade de la montagne. Il montait, montait sur les nombreux rochers, cherchant des prises. La peur avait souvent causé au loup de si vives poussées d’énergie. Si bien qu’il arriva au sommet en moins de temps qu’il ne faut pour le dire. Il regarda en bas. Les gobelins venaient à peine d’arriver au pied du majestueux roc. Mais il ne vit pas Tolsimir. Zut ! Avait-il grimpé trop vite pour son compagnon ? Mais une voix le fut sursauter.
-Bah, dis-donc, t’en a mis du temps !
-Ah ce n’est que toi, Tolsimir
, répondit Voja. Tu m’as flanqué une de ces frousses ! Mais comment as-tu pu escalader aussi vite.
-Mais par la route, comme tout le monde ! Sache qu’en général, pour accéder à une cité aussi haute, il faut un chemin assez facile. Sinon, comment l’armée de Rakdos pourrait-elle sortir et rentrer librement ? J’ai donc cherché, et j’ai trouvé la route qui mène à Rix Maadi.
-Gros malin, va, grogna le loup.
-Mais dépêchons-nous d’entrer : les gobelins ne devraient pas tarder à arriver !


Devant eux, les murailles de la ville se tenaient, encore plus imposantes encore qu’ils ne l’avaient imaginé. Mais cette fois, la hauteur des murs les effrayaient plus qu’ils ne les rassuraient. L’armée assoiffée de sang approchait d’eux. Heureusement que leurs armes en tout genre ralentissaient leur marche. Sans quoi, Tolsimir et Voja seraient déjà entre leurs mains. Tolsimir frappa deux coups à la colossale porte de Rix Maadi. Ces deux coups résonnèrent d’un bruit épouvantable, qui augmenta la frayeur des deux amis. Mais ils n’avaient pas le choix. Derrière eux, on entendait les cris féroces, semblables à ceux d’une meute de loups… euh non pas de loups (je risquerais d’offusquer Voja)… de…de… enfin d’autres bêtes féroces, voilà, point.
-Oui, un elfe et un loup, murmura une voix de l’autre côté de la porte. Entrez ! Vous êtes les bienvenus !
La voix était douce et légère. Mais le mot « bienvenus » fut prononcé avec une légère pointe d’ironie, voire de sadisme. N’importe qui l’aurait senti, mais Tolsimir et Voja, eux étaient bien trop épuisés pour cela. La voix, qui n’était autre qu’un rat de taille humaine, les conduisit dans une pièce où les deux amis purent enfin se reposer. Mais Tolsimir, dont comme on l’a dit l’ouïe est très fine, perçut une petite conversation entre le rat et la horde de gobelins, qui venait d’arriver.
-Alors, murmurait un gobelin. Vous les avez eus ?
-Oui
, répondit le rat. Vous avez bien réussi à les chasser jusqu’à nous !
-Où sont-ils, maintenant ?
-Dans un cachot humide… Mais ils n’ont même pas fait attention. Ils étaient bien trop épuisés.

Le gobelin et le rat partirent alors d’un petit rire sardonique. Tolsimir voulait bouger, s’évader tant qu’il en était encore temps. Mais il ne put. Ses yeux se fermèrent. Il s’endormit aussitôt.

Le lendemain, quand l’elfe s’éveilla, il sentit de l’agitation au-dehors. Mais je dis le lendemain, mais le ciel était toujours voilé de cette nuit de sang et de cauchemars. Tolsimir regarda autour de lui. Oui, ils étaient bien dans un cachot, les seules ouvertures étant la porte et la fenêtre, constituée de nombreux barreaux. L’elfe regarda alors par cette fenêtre. Un abominable spectacle s’offrit à ses yeux. Il y avait d’horribles monstres, gobelins, sangpyres, rats, qui riaient, se goinfraient de mets crus, le tout accompagné de bière à volonté. Et ce spectacle, sur le décor qu’était le ciel noir éclairé de la lune de sang, inspirait le dégoût à quiconque pouvait le voir. L’elfe demanda à son ami, qui venait de se réveiller :
-Dis-moi, Voja. D’où venait donc ton guide sur les guildes ?
-Ben, c’est un gars qui me l’a donné, un gobelin, je crois.
-Un gobelin ! Et il venait de quelle guilde ?
-Euh… Je ne sais plus… Mais je me demande s’il n’y aurait pas une éventuelle possibilité qu’il aurait pu être amené à…
-Va droit au but, s’il te plaît !
-...venir de Rakdos…
-De quoi ? Espèce de triple crétin ! C’est toi qui t’es fait arnaquer ! Ah, Rix Maadi, la splendide ville sur le rocher, un attrape-nigaud, oui ! Et on est tombé dedans !
-Tu m’en veux tant que ça ?
bredouilla le loup.
-Je m’en veux à moi aussi ! On aurait dû aller directement à Selesnya. Maintenant, il faut trouver un moyen de s’évader. Mais ils m’ont pris mon épée…
Tolsimir n’eut pas le temps de concevoir un plan. Un sangpyre avait remarqué qu’ils venaient de se réveiller. Il ouvrit la porte du cachot, et avec l’aide de quelques gobelins, leur fit traverser les rues de la ville. Partout, dans toutes les rues, c’était toujours des orgies répugnantes que l’on pouvait voir. La plupart des habitants regardaient les deux prisonniers avec un air empreint de mépris, brutalité. Il y avait même quelquefois des cadavres étalés sur le chemin. Pour les Rakdos, on aurait dit qu’ils n’existaient pas. Personne ne se souciait de quelques morts. Pour eux, ce n’était que des bouches en moins à nourrir. L’escorte de Tolsimir et Voja marcha sur les cadavres, sans se soucier d’eux. L’odeur de la mort parfumait les rues de la cité. On se demandait comment pouvait-on y vivre. Le groupe arriva au donjon central de Rix Maadi. Ce devait être la demeure royale de Rakdos, le maître de la cité, qui a donné son non à la guilde.

Deux horribles rats leur en ouvrirent les portes. Ils pénétrèrent alors dans une salle colossale. Cette salle était impressionnante tant par sa longueur que par sa hauteur. Aux murs, de nombreux blasons tous rouges et noirs étaient suspendus. Au sol, de nombreuses armures étaient exposées souvent accompagnées de masses d’armes et de double-hâche. On entra dans une deuxième pièce. Celle-ci était « décorée » de tous les instruments de torture imaginables. Ces deux salles effrayaient et impressionnaient les deux amis. Ils pénétrèrent enfin, dans la dernière salle, moins vaste, mais tout aussi effrayante. Ce devait être la salle du trône. En effet, un siège de pierre noire portant le cachet de Rakdos ornait la pièce. Dessus, un espèce de monstre rouge à cornes portant de grandes ailes plus foncées dans le dos était assis. Ce devait être, Rakdos, seigneur de Rix Maadi.

-De quelle guilde venez-vous ? cria-t-il aux deux prisonniers.
-Nous n’appartenons à aucune guilde, répondit calmement Tolsimir. Nous errons dans les terres de Ravnica, et nous espérions trouver asile et hospitalité chez vous.
-Hahahaha, ricana Rakdos. Asile et hospitalité chez nous !!! On ne me l’avait jamais faite.
Puis, il cria avec fureur :
-Et vous croyez que je vais gober ces sottises ?
-C’est pourtant la vérité.

Cette réponse, prononcée si calmement mit le maître de la ville hors de lui. Il prit alors l’épée, et la montrant hurla :
-Et ça, alors, qu’est-ce que c’est ?
-Ce n’est que mon humble épée !
-Humble épée…humble épée… Vous me fatiguez, si vous ne me dites pas la vraie vérité, je vous laisse entre les mains de cette bande de gobelins.
-Mais, je vous jure que c’est exact !
-Assez ! Vous l’aurez voulu. Gardes, amusez-vous avec eux !


Tolsimir et Voja ne savait plus quoi dire. Ils avaient dit l’exacte vérité mais cela ne suffisaient pas à Rakdos. Et qu’avait cette épée de si extraordinaire ? Quelle idée de se poser des questions comme cela à un moment pareil. Leur mort approchait, c’était inévitable ! En effet, les gobelins réfléchissaient à quelle supplice allaient-ils mettre fin à leurs jours :
-Si on les mettait au chevalet de torture ? proposait l’un.
-Trop banal, ripostait un autre. On pourrait plutôt les brûler !
-Euh, non : depuis qu’on a fait cramé la moitié de la ville en faisant flamber une bande de Simic, le maître nous tuerait s’il voyait qu’on recommence.
-Et si on les pendait ?
-Trop banal également.
-Mais dans la forêt, au pied de la montagne !
-Pas bête, pas bête ! Qui est d’accord ?

Tout le monde était d’accord. On lia de la tête aux pieds les prisonniers, et on les attacha à un char. Un gobelin prit les rênes et dévala la route, suivi de tous ses compagnons qui couraient. Le conducteur n’allait pas trop vite, par crainte de tuer les condamner avant l’heure. Ainsi, ses compagnons le suivaient facilement. Des rats et des sangpyres les rejoignirent également. A l’arrivée dans la forêt, Tolsimir et Voja était couverts de sang, mais toujours vivants. On leur mit la corde au cou, corde que l’on fit passer par-dessus une branche. A l’autre extrémité de la corde, les gobelins tiraient pour faire décoller du sol leurs victimes.
Tolsimir sentait qu’il allait étouffer. Il respirait de plus en plus lentement, les vaisseaux de ses yeux éclataient. Une minute de plus c’était l’asphyxie.

A suivre…

Arrêt en plein suspense... et maintenant, si vous eu le courage de lire la totalité de l’histoire dites-moi ce que vous en pensez.